Goon : Le "Slap Shot" de 2012



C’est le deuxième film que je visionne, qui s’est servi à son plein potentiel, du thème de l’absurdité, en succédant à Extremely Loud and Incredibly Close. Quelles étaient les chances vraiment, que ce soit un autre film sur l’absurde ? Là maintenant, j’en ai quelque peu marre des films, qui exploitent l’aberration, et je voudrais de la variété, pour les prochaines œuvres à l’affiche. Tout d’abord, pour un film traitant du hockey, il est simple de l’aborder pour son aspect de la comédie sportive. Or, le film est trop magnifiquement bien réalisé pour le voir uniquement comme une simple comédie sportive. Michael Dowse, connu précédemment pour sa docu-fiction Fubar, nous amène un portrait bestial et franc du monde du hockey. Si on retrouve l’aspect loufoque de la comédie au niveau scénaristique, on voit aussi l’essor de la brutalité et du machisme déments qui règnent dans le sport. Par ailleurs, si vous avez un côté humaniste, pour moi ce sera l’un des premiers films qui vous fera haïr le hockey. En opposition, si on est un entraîneur ou un athlète de hockey, on trouvera que le film est ridicule, même si c’est drôle, n’ayant aucune crédibilité.
Slap Shot réalisé par George Roy Hill, et écrit par une écrivaine et non une journaliste sportive, Nancy Dowd, avait ce même effet polarisant, dès sa sortie en 1977. Ceux du milieu sportif trouvaient que le film de Hill était une pacotille infâme. Et d’un autre côté, le public et les critiques appréciaient le fait que le film démontrait l’absurdité de la violence au hockey, par l’humour. Pour faire son scénario de Slap Shot, Nancy Dowd s’est inspiré de l’histoire de son frère Ned Dowd qui était joueur de hockey dans une petite ligue, et dont l’équipe est devenu dissoute. C’est strictement le même résultat avec Goon : Le Dur à Cuire, parce que l’on nous offre un réalisme comique, au point de vue du scénario. L’écriture se voulait totalement comique et déraisonnable, en ne recherchant pas l’authenticité à tout prix, parce que c’est une fiction qui s’assume en tant que fiction, et pas autrement.
Cependant, l’absurde et l’invraisemblance sont tellement poussées que l’on ne sait plus trop quoi penser. Le personnage vaillant et dévoué de Seann William Scott, Doug Glatt ne devient plus un joueur de hockey, mais comme batailleur de l’équipe, il devient une machine à souffrir. La moins édifiante des scènes de Scott, est lorsqu’il veut stopper la rondelle, et que le filet est désert, il plonge pour l’arrêter. Alors, sa figure et la tête la reçoit, et nous constatons l’événement glacial et sordide par le hors-champ. Comme spectateur, c’est l’un des rares moments où j’ai eu vraiment peur pour l’acteur principal, en me disant : «Oh merde, Seann. J’espère que vous êtes correct mon vieux. » Finalement, pour que je le perçoive ainsi, c’est sûrement à cause de l’excellente et percutante réalisation de Michael Dowse, ne ménageant pas dans la postproduction. Le réalisme de Dowse est acéré, on ne peut en dire davantage.
Du peu de recherche que le film serait constitué, on explore dans l’intrigue le milieu du hockey dans les ligues mineures, si on trouve des exemples de ligues mineures au Québec. Le film nous apprend à sa sauce qu’un goon, ou un enforcer, est un joueur, chargé de  protéger les meilleurs joueurs de son équipe, des batailleurs adverses. Ou bien, le goon s’engage d’incapaciter l’équipe adverse de ses meilleurs joueurs, au moyen de solides mises en échecs, ou de solides batailles, etc. Un goon est un homme de mains qui fait des «jobs de bras» sales, sur la patinoire. Ou parfois, le goon tape sur la gueule du monde, parce qu’il aime cela aussi. Et c’est cela, il n’y a rien de plus. La prochaine fois, si vous produisez une comédie, recherchez donc votre sujet. On n’exerce pas une énorme connaissance du milieu du hockey, et c’est ce que l’on retrouve. On détient autant de connaissances pour le sport, du niveau d’un partisan. Les personnages sont suffisamment étoffés.
Afin de satisfaire ma propre curiosité, qu’est-ce que Goon : Dur à Cuire, aurait de l’air, si un journaliste sportif l’avait écrit ? Bien on déduit que le film serait encore comique, mais on aurait cherché à être réaliste et vraisemblable dans le sujet. Quand on y pense, la violence dans le sport, est déjà accepté pour un reporter, alors le film deviendrait moins axé sur celle-ci. Pour un reporter, cela devient un fait parmi tant d’autres, et le jeu violent n’a pas accès dans l’intrigue. Les auteurs, de leur point de vue extérieur, ont longtemps exercé cette fascination pour la violence dans le sport, où on utilise la violence pour des fins commerciales. D’où vient cette fascination véritable pour les auteurs, provenant de l’extérieur du domaine des sports, à la violence ? Or, de toute manière, le récit est bien construit et bien fignolé par Evan Goldberg et Jay Baruchel.
Seann William Scott nous livre une performance d’une sincérité émouvante, tant que Doug Glatt est un personnage aimable, dévoué pour son équipe. Scott est si sympathique et drôle, qu’on le plaint un peu d’être seulement un batailleur pour faire sa vie. D’autre part, je crains que le film puisse avoir des conséquences néfastes pour le bon déroulement de sa carrière. Scott est très drôle, mais il doit se forcer à trouver des rôles intelligents. Nous avons la présence de Nicholas Campbell, un grand acteur dans un trop petit rôle, celui du premier coach de Doug, que cela en est insultant pour ses talents.  Kim Coates est magnifique comme coach intransigeant, au caractère acerbe, agaçant et déplorable des Highlanders d’Halifax, Ronnie Hortense. Marc-André Grondin avait la seule performance qui était un peu, en bas de mes attentes, parce que j’ai connu son magnifique travail dans 5150, rue des Ormes. Bof, disons que le rôle d’un joueur de hockey imbu de sa petite personne, n’est pas vraiment un rôle qui lui colle très bien. Jay Baruchel incarne l’insupportable personnage du meilleur copain de Doug, occupant le métier de chroniqueur sportif, Pat Houlihan. Pour Baruchel, il s’agit d’une prestation sordide dans le cabotinage à l’excès. La distribution dans sa totalité était très bonne.

7.2*/10

(Photo:Geeksofdoom.com)

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