State and Main ( 2000 ) de David Mamet

David Mamet, un dramaturge américain majeur natif de Chicago, a graduellement quitté le théâtre pour le cinéma, après avoir marqué l’histoire de cet art des planches d’œuvres majeures, Glengarry Glen Ross et American Buffalo. Au début de sa carrière de cinéaste, il commençait déjà en tant que scénariste, et écrit le film de Sidney Lumet en 1982, The Verdict. Un drame juridique intense qui mettait en vedette le grand acteur Paul Newman, dans le rôle principal d’un avocat alcoolique, au bout de perdre sa cause dans un tribunal. Depuis ce temps, à la fin des années 80, Mamet œuvrait sur l’adaptation cinématographique de ses propres pièces, dans l’exemple d’Edmond, American Buffalo tout autant que Glengarry Glen Ross. Par la suite, vers le début de sa carrière prolifique, il façonna ses scénarios originaux en abandonnant complètement le théâtre, sans toutefois se soucier de réaliser ses propres films, pour les films, Hoffa, The Edge, Wag the Dog, et Ronin. Mais avec State And Main, il décidera de prendre la maitrise de la caméra et de la mise en scène.

Ce qu’il y a de particulier dans le théâtre et le cinéma de Mamet, est qu’il est capable de redonner un sens nouveau, ou peut-être un souffle nouveau dans le genre policier. Concernant American Buffalo et Glengarry Glen Ross, ce ne sont pas purement des pièces polars ou noires, parce que tout ce qui est issu du genre policier n’est qu’un contexte, et c’est ce qui rajoute au théâtre et au cinéma de Mamet, la qualité d’être des œuvres inclassables. Les pièces de Mamet existent uniquement pour leurs personnages, et Mamet ne sait pas faire un personnage vide et creux, aux abords d’une inhumanité certaine. Cela n’existe pas dans l’univers de Mamet, qui est un monde d’hommes, un monde masculin de rapaces désabusés. Mamet est un auteur reconnu internationalement pour la construction de ses personnages, et de son propre apport à l’intrigue. Il n’est pas reconnu pour sa quantité d’obscénités, ainsi que de la vulgarité contenues dans ses chefs-d’œuvre, et c’est ce que certains de ses détracteurs obtus voudraient faire croire.

Or, dans State and Main, Mamet décide d’oublier l’intensité et la tension lourdes des drames policiers ou juridiques pour la comédie de manières. Et c’est très inusité chez lui. Mamet veut se sentir comme Noel Coward ? Pourquoi pas, car Mamet a fait une comédie légère, en nous fabriquant un scénario fort et très bien ficelé, à son habitude, dont l’intrigue repose sur les personnages. Cela nous fait un très bon film, avec d’intéressants retournements.

Nous suivons les tribulations d’une équipe de tournage hollywoodien, se retrouvant dans un petit comté du Vermont : Waterford, afin de filmer des scènes de moulin à eau, que le petit comté aurait préservé. Toute l’équipe arrive du New-Hampshire. Cependant, Walt Price, le réalisateur, interprété par William H. Macy, découvre que le moulin à eau s’est fait incendier au sol, pendant les années 60. Le moulin n’existait plus, depuis assez longtemps. Alors, vu que l’équipe a un budget restreint et on ne peut bâtir un nouveau moulin, Walt demande au scénariste Joseph Turner White, interprété par Philip Seymour Hoffmann, de réécrire le scénario presque totalement. Joseph doit omettre les scènes intérieur et extérieur de moulin pour les remplacer par autre chose, ce qui changera le titre du projet, Le Vieux Moulin, pour autre chose. Joseph ne sent pas capable de le faire et il en devient angoissé, et tout cela avant les quatre jours du tournage. Par la suite, le film fait étalage de sous-intrigues, en montrant les interactions entre Walt et les acteurs, son producteur, sa costumière. L’actrice Sarah Jessica Parker qui doit jouer une scène difficile, ainsi que du maire du comté, dont Walter veut de lui les permis du tournage, en ayant l’honneur d’aller dans son gala.

Il se pourrait que le personnage Joseph Turner White, soit carrément Mamet lui-même. Mamet nous sort une œuvre à la fois étrangement bien faite pour que ce soit de la comédie. Le film ne marquera pas nécessairement l’histoire du cinéma, on est encore loin de la. Mais Mamet ne sait pas décevoir, il sait manier la comédie, tout autant que le drame. Or, Mamet dévoile toute son expertise dans le drame. Tous les personnages sont attachants, malgré que Mamet nous révèle tour à tour, pour chaque personne, leurs défauts, leurs qualités, ainsi que leurs excès. Comme à son habitude, tout cela s’articule dans des dialogues, mordants et ciselés.

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