Après la grève à perpétuité, on fout quoi?

  Récemment, j’ai commenté l’un des articles, Le prix d’un diplôme , de ma collègue Marilène Pilon, d’une remarque plutôt caustique, à l’endroit de la situation, issue de son article:
«Quant à moi, si j’ai des enfants, je vais déménager toute la famille en Ontario.»
La grève générale illimitée me fit cet effet-là, du fait que l’on ne sait plus au juste ce qu'il adviendra de l'agir des étudiants, assujettis à cette hausse des frais de scolarité. Une hausse de 325 $, annuellement, et dont la somme s’accumulera chaque année, pour une période de cinq ans. Serait-ce mieux de vivre ailleurs qu’au Québec, car l’herbe semble plus verte aux frontières de la province, en ce qui concerne une éducation abordable ?   Pour le moment, c’est le premier billet où je me sens plutôt éditorialiste. Je ne peux pas rester indifférent face à cela, parce qu’après tout, j’ai déjà été universitaire, et cela tout récemment. Je payais mes cours, ce qui incluait tous les frais possibles et inimaginables.   Même pour un programme universitaire qui ne serait ni en Médecine ou en Droit, la session universitaire à temps plein qui coûte déjà, 1 200 $, ira jusqu’à une somme de 1 565 $ par session, au bout de deux ans. Tout dépendant des étudiants, s’ils sont dans la première catégorie d’élèves issus de milieux bourgeois et bien nantis, ils n’éprouveront aucune difficulté à payer la facture, tandis que la deuxième catégorie d’étudiants va travailler d’arrache-pied. La deuxième catégorie d’étudiants ont des emplois pour subvenir minimalement à leurs besoins, et payer les factures de semestre. La famille pourrait aider, mais il y a aussi des limites financières et personnelles, à ce que les proches peuvent aider concrètement. Remarquez, ce ne sont pas tous les étudiants, qui sont les enfants chéris de leur famille.   Le nombre faramineux d’étudiants/grévistes s’échelonne au cap des 120 000. C’est probablement les cent-vingt mille étudiants qui vivent durement leurs études au point de vue de la stabilité financière. Les cent-vingt mille étudiants arrivent laborieusement à joindre les deux bouts, et même à arriver au bout du mois, en ressortant indemnes. Ils paient soit leurs cours, soit le loyer mensuel de 800 dollars, quand ils n’ont pas le choix, et c’est une question de priorités aussi, parce que l’on paie son loyer bien avant sa scolarité. Le prix d’un diplôme est difficile à payer, mais à la limite, cela devient compliqué à gérer. Attendu que dans son endettement présent, l’étudiant qui reçoit son baccalauréat ou un diplôme du premier cycle peinera à rembourser ses prêts et bourses. Il ne jouira assurément pas du fait que la somme faramineuse de 20 000 dollars pour un baccalauréat diminue environ de cent dollars par mois, lorsque l'on rembourse son prêt étudiant dans des institutions financières. L’étudiant possède tout le temps du monde pour payer ses créanciers gouvernementaux, c’est juste que le temps pour lui semblera éternel, sans parler des frais d’intérêts qui s’appliquent de 4% par année, minimum, selon son prêt et ses capacités de payer souvent précaires.   Ce qui m’est révélateur de la hausse des droits, c'est que l’on veut rendre impayable nos propres études. Certes, ce n’est pas exactement véridique non plus qu’un finissant universitaire décrochera des emplois ayant des salaires à six chiffres. Dès que l’on est finissant, on n’est pas toujours ingénieur, avocat ou médecin non plus. Cela me rappelle aussi un article que j’ai écrit sur mon blogue personnel, intitulé L’éducation universitaire est incompatible avec son marché de l’emploi.   J’ai écrit cela, en constatant que ce n’était pas tous les diplômes universitaires qui détenaient une valeur égale. Si vous avez un Bac. ès Arts en Lettres, en Sciences humaines, en Arts appliqués ou en Communications, eh bien vous allez peiner pour vous trouver de l’emploi. Mais en résumé, le grade de Baccalauréat ès Arts, pour tous les champs d’études et de discipline, conduit presque instantanément vers le journalisme, qu’on le veuille ou non. Une personne qui fait un Baccalauréat en Sciences politiques dans le cours de ses études, le conduira nécessairement au journalisme politique, ou selon un meilleur concours de circonstances, député.

Une personne qui fait un Bac. en Cinéma tout comme moi en principe, deviendra un journaliste culturel des Arts et Spectacles, ou dans des circonstances idéales, un cinéaste qui vit de son art. Le seul hic, c'est que les postes en journalisme fonctionnent presque uniquement avec de bonnes connexions. Et si vous n’avez pas de connexions, exploitez vos connaissances en écrivant des billets de blogue, en devenant blogueur à cet effet. En fait, si vous avez un quelconque talent, on vous remarquera, sinon faites comme les milliers de ratés, et recyclez-vous dans la formation continue. Ne voulant point faire dans la noire ironie, c’est un peu cela la vie d’universitaire au Québec.   Le plus désolant est que le Québec devient progressivement prolétaire, parce que l’on se concentre davantage à fixer notre attention sur des formations techniques, menant directement aux “emplois d’avenir”. On omet, ou on se moque, de l’épanouissement personnel de l’individu pour une bonne alma mater . On veut que l’individu soit constructif dans la société pour qu’il travaille le plus rapidement possible, comme force de travail au Québec. On ne veut plus des intellectuels, et on s’organise pour que les hautes études deviennent inatteignables, dans la perspective de la facture. On croit idiotement qu’un intellectuel est évidemment un richard, ce qui n’est jamais souvent le cas. Pour conclure, la balle est dans l’énorme camp des étudiants/grévistes qui procéderont à leur grève générale illimitée, et ils saisissent en ce moment le destin entre leurs mains. La futilité ou la victoire seront incontestablement au rendez-vous, il sera simplement question de connaître quel sera le dénouement de ce troisième acte. Quelle sera la longue résolution finale de la grève générale perpétuelle des universitaires et des cégépiens ?

 (Photo : Yves Provencher - Journal Métro)

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