Frisson des collines / Réal : Richard Roy, Scén : Michel Michaud et Richard Roy – Roy se veut un Jules Renard contemporain.


Dans ce film, je voyais toute la parfaite effusion d’un roman de Jules Renard, mais plus spécifiquement Poil de Carotte. On rigole avec le nom d’un personnage principal, celui d’un jeune garçon blondin, en lui créant un qui serait coquet et jovial, tel que Frisson des Collines. Ou tout court, Roy et Michaud, les scénaristes, décident de le nommer Frisson Desjardins. C’est encore un film québécois qui devient en soi une pièce périodique des années 60 et 70. On observe dans une atmosphère tout à fait renardienne, les 400 coups de Frisson, dans son exploration hormonale et sexuelle avec les filles de son âge, ainsi que sa maîtresse d’école. On ne veut plus nous lâcher avec le passé des années 70, lorsque l’on devrait se concentrer finalement sur autre chose, parce qu’il manque une grande part de contemporanéité. Quand on y pense, qu’est-ce qu’il y aurait de si grave de faire un film en le situant dans les années 2000 ou même bien les années 90 ? Mieux encore, si on voulait faire un retour à la simplicité, on prendrait le contexte d’une année pendant la période des années 90, avant l’avènement de l’Internet.


On constate dans le délice et le désarroi les tribulations d’enfant du jeune Frisson des Collines, interprété par Antoine Olivier Pilon, vivant vers la fin des années 60. Au travers de ses obsessions personnelles, Frisson veut notamment aller coûte que coûte au Festival de Woodstock en 69, la mecque ultime et éphémère du rock n’ roll et de la contre-culture. Un rêve d’enfant qui devient rapidement accablé par la mort tragique de son père, Aurèle Desjardins, interprété par Patrice Robitaille, électrocuté dans son travail accroché à un poteau téléphonique, essayant de réparer les câbles. L’accident est témoigné devant Frisson. Suite à la mort du père, la mère, interprétée dans une rafraichissante sincérité dans l’agonie par Anick Lemay, ne devient rien de moins qu’une épave, complètement faible de caractère. Étant donnée que c’est un cimetière de village, et dans le village, leur maison se retrouve juste à côté du cimetière, elle prend une chaise pliante pour s’asseoir devant la pierre tombale de son défunt époux. Entre en scène Tom Faucher, interprété dans une immense mesure par Guillaume Lemay-Thivierge, où je peux finalement comparer finalement sa performance à un jeune Jean Gabin dans un film de Duvivier. Dans ce film, Lemay-Thivierge est tout simplement extraordinaire. Il est véritable, sincère, dans ce rôle, et a décidé de prendre ce qui était véritablement lui, en n’ayant aucun reproche.

La mise en scène est sobre et classique pour ce film campagnard, en ayant la fidèle ressemblance d'un très bon Marcel Pagnol, tout en cultivant cette écriture à la Jules Renard. Une écriture scénaristique à la Jules Renard qui avait le travail des trois scénaristes : Denis Thériault, Michel Michaud et Roy lui-même.


Anick Lemay m’a complètement subjugué, puisque l’on est capable de ressentir toute sa peine viscérale pour son personnage de femme faible, pourrie et inactive par le deuil. Le remarquable Antoine Olivier Pilon, dans son premier grand rôle de Frisson m’a attendri des joyeuses conneries, tournant malheureusement à l’obsession lorsqu’il s’agit de rencontrer son idole Jimmy Hendrix. Frisson fut un personnage complexe finalement entre la déprime et l’obsession, ce qui lui déchire intérieurement. Son fragile désir de maturité et de musique, enveloppé dans un petit cœur de 10 ans, à l’éveil des femmes. Le garçonnet blondin entretient une relation de grand frère avec le personnage de Lemay-Thivierge, Tom Faucher. Il tombe dans l’amour et la jalousie avec sa propre maîtresse de village, Hélène Paradis, incarné avec consistance et désinvolture par Évelyne Brochu.


Enfin bref, un film excellent si vous adorez du Marcel Pagnol, tout comme du Jules Renard, et c’est un joyeux mélange des deux.


4.5*/5



M.L



Le 1er mai 2011

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