« Les Roux » - websérie de David Paradis - Une chasse absurde de roux, un racisme absurde de roux.

En voyant tous les cinq épisodes d’un seul jet, je ne savais pas trop quoi penser ou quoi dire, puisque l’on essaie d’exercer une discrimination fictive dans un univers fictif, celui de David Paradis, étant lui-même un rouquin. Dans cette websérie, on rentre de plein fouet dans un humour absurde, or ce même humour arrive à s’user très facilement. Ce n’est pas le genre d’humour que l’on rit sporadiquement à gorge déployée, malgré que l’on constate quelques gags visuels, jusqu'a très peu, qui sont quelquefois hilarantes. Ce qui prend l'issu d'une thématique, en entourant certains personnages, serait en sorte une discrimination des roux et des rouquins, de toutes origines confondues. Pour une discrimination probable qui existerait dans cette série, c’est tellement farfelu et tellement con comme racisme social et ordinaire, que l’on éprouve une certaine misère afin de lui reconnaître son humour. Lorsque la série devient, soit idiot ou soit drôle, au gré de l’écriture des épisodes, en arborant le sujet d’un « racisme de roux », j’éprouve moi-même une certaine difficulté à en discuter sérieusement dans cette critique. Un « racisme de roux » me parait tellement idiot et inconcevable, que je ne retrouve plus vraiment son humour. Cependant, je comprends parfaitement le message de Paradis : n’importe quel genre de racisme est idiot, que ce soit un racisme ordinaire organisé dans le préjugé, ou un racisme bestial qui conduit des gens haineux vers l’homicide inutile. C’est délicat comme sujet, mais on le fait gracieusement dans le détournement de l’humour, au lieu de l’affronter à brûle-pourpoint comme Spike Lee.



C’est une websérie assez bien réalisé par Paradis, en essayant d’adopter le cinéma direct du documentaire à la mise en scène de sitcom(The Office). Tout ce que l’on pourra s’attendre de Paradis, et cela va l'être du début vers la fin. Probablement le seul vent de fraîcheur que contient la série (un mixte de docu-sitcom), en misant sur le style au lieu de la substance comme n’importe quel film hollywoodien. La substance reste encore un potentiel inexploité, puisque tout s’installe dans le détournement d’un humour irrévérencieux. Étant donné que ce n’est pas rien que de l'humour irrévérencieux ; il faut que le récit puisse gagner de la vapeur, et que Paradis puisse instaurer de cette bonne et fameuse substance qui serait gaspillée totalement ; à force de ne pas le prendre à meilleur escient. En faisant un drame, façonné autour du thème du racisme, on peut produire un cinéma passionnant et classique : Do the Right Thing de Spike Lee, Colors de Dennis Hopper, Chien Blanc de Samuel Fuller et Crash de Paul Haggis. Le racisme ne fait pas toujours des comédies intéressantes ; or pour que la comédie devienne bonne, immanquablement ; il faut que son réalisateur et son scénariste contiennent des talents prestigieux. Alors, il n’est pas pour rien que j’espère que la série va gagner de la vapeur, parce que ça n’annonce rien de bon véritablement.


On coupe nettement dans la cohésion de ses filons d’intrigues, afin de nous proposer un humour quelquefois drôle et quelquefois ringard. Paradis fait courir trop de lièvres à la fois, et ne sait pas nouer et réunir ses filons d’intrigue, en allant dans n’importe quelle direction pour son écriture. Les motifs des personnages sont complètement absurdes, et on y décroche facilement. Les dialogues expliquent à peine le vrai fond des kidnappeurs lorsqu’ils enlèvent Martin Fontaine, un chanteur roux impersonnifiant Elvis Presley dans une comédie musicale Elvis Story, jouée depuis des temps immémoriaux au théâtre du Capitole. Paradis joue de cinq filons d’intrigue et ne sait pas comment les manier dans leur ensemble. Par conséquent on ne devrait pas s'attendre à une réelle résolution vers cette fin s’il y en aura, puisque tout reste dans une stagnation inquiétante et confuse. S’il était question d’allonger les épisodes dans la durée ; bien Paradis se devrait de le faire, puisqu’une structure épistolière peut contenir une fin ouverte ; mais dans un épisode, on se doit d’avoir un début, un milieu et une fin: ouverte ou fermée. Narrativement parlant, les épisodes en sont sérieusement handicapés de cette cohésion.


Le jeune David Cloutier nous procure une très robuste performance, et la seule qui serait la plus intéressante dans cette série ; puisque l’on sent que les autres acteurs n’avaient rien à travailler dans leur rôles. Cloutier interprète le jeune Marcel, un jeunot ostracisé du monde extérieur par ses parents, interprétés par Viviane Pascal et Jacques L’Heureux. Pascal et L’Heureux sont de très bons acteurs, or ils éprouvent de la difficulté à rendre crédible une haine ou un préjugé très absurde qui serait la haine des roux. L’Heureux est facilement drôle et guignol, il l’a toujours été, cependant L’Heureux est aussi dans une série, qui ne sait pas justement, si elle doit être un drame ou une comédie. Alors, je ne peux le blâmer. Christian Baril et J.-Marc Dalphond, les ravisseurs de Martin Fontaine ou « Martin Fontaine », livrent une performance stable sans trop de recherche, et toutefois semblent très ennuyés et inconfortables dans leurs rôles de kidnappeurs, s’efforçant d’être naturellement convaincants. Martin Fontaine est excellent dans son rôle de "kidnappé", or Fontaine devrait avoir plus de scènes écrites dans la compagnie de David Cloutier, fignolés par d’autres dialoguistes. Catherine Brunet ne fait même pas de rôle de soutien, elle joue  un rôle tellement minuscule, qu’elle manque d’authenticité. Elle joue le rôle de la copine d’un roux et c’est tout. Elle est réduite à une belle de service.


Pour conclure, une série potable par son style de réalisation, qui ne l’est pas véritablement dans son écriture. Espérons que les web-épisodes vont être finalement meilleurs.


3.3*/5

M.L


Le 17 avril 2011

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