1981, de Ricardo Trogi - Un petit prince a Ste-Foy

Ah! Les années 80! Une époque où la dernière trouvaille dans la mode et l’électronique, tels que le baladeur ou les leg-warmers, devenait tout aussi convoité que le trésor des Incas. Bill Gates débutait les premiers balbutiements de son empire Microsoft, suite à l’abandon de ses études à Harvard, en vendant son premier produit Microsoft Windows. La folie des premiers jeux vidéos d’arcade : Pac-Man, Defender, Astéroïds, et Dig-Dug, fit remplir les salles d’amusement, d’adolescents dont le visage fleurissait d’acné forte. Alors, cette merveilleuse décennie, encore lointaine pour certains, devient le canevas d’un mémoire d’enfance pour Ricardo Trogi, 1981.

Trogi décide d’oublier les comédies de mœurs, Horloge Biologique et Québec-Montréal, afin de se tourner vers son enfance, et du même coup, il l’approche avec une pointe d’ironie et de nostalgie ludique. Il ne décidera pas d’en faire un drame biographique banal, en suivant rigoureusement la réalité historique de son passée. Au contraire, le résultat n’en est que tout autre et c’est électrisant.

En 1981, nous suivons le petit Ricardo Trogi, un élève de sixième année à l’école Saint-Exupéry, dans le quartier de Ste-Foy. Un jeune garçon qui exaspère ses parents avec ses énormes besoins matériels, comme un walkman argenté ou un nouveau kiwi rouge. Tous ses besoins impulsifs de jouets ou de babioles, provenant du catalogue du Distribution aux Consommateurs, dont il en tourne les pages religieusement, même dans sa classe d’école. Son père occupe le métier d’accordéoniste de restaurant, tandis que sa mère est une barmaid. Tout le film n’en devient que les larges tranches de vie de son enfance.

Ce qui nous surprend dans ce dernier film de Trogi est la sincérité de son propre réalisateur, afin de nous montrer à travers son regard, la vraie nature et la vraie période de l’enfance. Soit en se basant sur lui-même, ou de ses propres enfants, Trogi nous plonge dans l’univers d’un enfant de dix ans, qui est lui-même, et cela d’une parfaite crédibilité en ce qui attrait de son travail de dialoguiste. D’un côté, la psychologie de l’enfance dans ce film parait à première vue superficielle, mais lorsqu’il faut attaquer le sujet de l’enfance, on ne pourrait pas n’en chercher une profondeur importante chez des personnages. Il le façonne d’un ton drôle, détachée et humoristique. On s’éveille minutieusement au monde de l’enfance chez Trogi, en nous donnant presque l’allusion qu’il l’aurait observé pendant la majeure partie de sa vie.

Trogi détient un sens magistral de la mise en scène, en ce qui concerne de réconcilier dans sa structure dramatique, la folie ordinaire des drames quotidiens au foyer familial, la vie étudiante à l’école primaire, la vie de garçon avec les copains, et pour finir l’imaginaire propre du petit Ricardo. Le tout parait bien ficelé, et on ne voit pas les défauts de lourdeur et de longueur, car tout se fait avec transparence.


On en garde une consistance et une cohésion excellentes. Néanmoins, il faut souligner le travail d’un autre auteur, Jean-Claude Lauzon, pour son film Léolo, réalisé en 1992. Lauzon a marié la folie sauvage et dysfonctionnelle d’une famille pauvre dans un réalisme brut, avec de la poésie visuelle, ainsi que de l’univers onirique de son personnage principal, Léo Lauzon. Certes, Trogi ne dégage probablement pas la superbe poésie de Lauzon, dont le talent est encore inégalé depuis. Trogi a encore ce professionnalisme de la mise en scène, malgré que l’on sait habituellement qu’il se spécialise seulement dans le régime de la comédie.

Finalement, ce que l’on peut reprocher à 1981, est en soi son manque de substance, puisque l’on ne pourrait disséquer le film, de n’importe quel sens interprétatif. On ne peut trop savoir des motivations propres de Trogi pour exposer au cinéma, son enfance. Autrement, il n’en est que du bon divertissement, même pour un film d’auteur, un film accessible au grand public dû à sa facture commerciale.


Fiche technique

35mm / coul et n/b / 122 min / 2009 / fict. / Québec

1981
Réal et Scéna : Ricardo Trogi
Prod : Nicole Robert
Dist : Go Films
Mont : Yvann Thibaudeau
Musique : Frédéric Bégin
Int : Jean-Carl Boucher, Claudio Colangelo, Sandrine Brisson, Gabriel Maillé, Danny Bouchard, Léo Caron, Marjolaine Lemieux

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