The Lawnmower Man de Brett Leonard

Au début des années 90, le cinéma a rejoint l’univers des technologies numériques, dans les fins de rendre obsolète la pellicule. La pellicule était la seule technologie d’origine durant les cent ans de l’existence du cinéma, qui accordait à cet art ses lettres de noblesse. La pellicule a défini le cinéma autant que la photographie, se situant comme un art de la réalité. Ensuite, les technologies numériques ont pris possession du cinéma, afin de le débarrasser à tout jamais de la pellicule. Vers le milieu des années 90, ce fut la mort de la pellicule et la naissance du cinéma numérique. La capture du réel se produisait de manière numérique et non analogique. L’image numérique devenait un message binaire, tandis que l’image analogique se devait d’être la reproduction exacte d’un modèle sur une surface, pour la photo comme pour la pellicule. Or, à la fin des années 80, il y eu l’avènement d’un nouvel art informatique, qui devait rivaliser avec le cinéma sous toutes ses coutures, la réalité virtuelle. On a voulu faire de l’univers du cinéma, un univers interactif du jeu vidéo, cependant il y a eu des tentatives infructueuses.


Ce ne fut qu’après, quand la nouvelle technologie de la réalité virtuelle, a ouvert de nouveaux horizons, concernant toutes les possibilités de la création des univers virtuels. Hélas ! Toutes les attentes les plus grandes que l’on se faisait à l’idée de la réalité virtuelle, se sont soldées en un échec. En effet, les attentes devenaient trop grandes à un point tel, que la technologie de la réalité virtuelle passait de mode. Elle devint d’ancienne mode, avec ses tentatives avortées pour ensuite la remettre sur le marché. Alors, tout se solda en un échec. Par conséquent, la réalité virtuelle a connu une mort jeune. Par ailleurs, certains cinéastes, tels que Robert Logan, Brett Leonard et David Cronenberg, furent critiques à l’égard de la réalité virtuelle. Ils en insufflaient les dangers de la nouvelle technologie. Des cinéastes furent critiques au fait que la réalité virtuelle discrimine la réalité véritable et concrète.

D’une certaine façon, la réalité virtuelle dénigrait la vie de tous et chacun, en leur présentant une vie virtuelle, qui était en soi une vie idéale. C’est une vie meilleure, en comparaison de la vie réelle, du quotidien. La réalité virtuelle devint un cinéma de l’immersion. Montrer le danger de la réalité virtuelle, ne fût que montrer l’assouvissement de fantasmes dans les jeux de rôle, dans une réalité superficielle, peuplée d’artifices. Ces mêmes jeux de rôle produisaient des mises en récit et des mises en intrigue. Entre autre, le film The Lawnmower Man, réalisé en 1992 par le réalisateur et co-scénariste Brett Leonard, se veut un conte d’avertissement à l’égard de la réalité virtuelle. D’autant plus que Leonard y insufflait un questionnement philosophique. Un questionnement philosophique qui se rattache aux limites de l’homme face à la nature et à la science : « Est-ce que je peux améliorer ma condition humaine, ou ma condition d’être humain avec les technologies produites par l’homme ? Est-ce que je peux altérer le dessin de la nature ? » Étant donné que le film est un portrait pessimiste de la réalité virtuelle, il serait fascinant d’explorer le côté de l’immersion et de la simulation de la réalité virtuelle dans le film de Leonard. Tout au long de ce discours, nous élaborerons ensemble le sujet de la définition propre de la réalité virtuelle avec le cinéma, tout autant que des notions du cinéma d’immersion et de l’interactivité. Nous terminerons avec la présentation de l’œuvre, ainsi que l’analyse philosophique du film.



La réalité virtuelle révélait son paysage propice au cinéma, mais uniquement dans le genre foisonnant de la science-fiction. Comme un outil ou un code dans les conventions d’un genre, la réalité virtuelle est indissociable du domaine de l’informatique. L’informatique en lui-même est indissociable de la science-fiction. Prenons la réalité virtuelle isolée comme technologie, c’est une technologie associée aux jeux vidéo. On veut qu’un joueur fasse les premières expériences avec un environnement infographique, entièrement artificiel, créé par ordinateur. Dans l’exemple d’un film intitulé Brainscan, de John Flynn, un jeune homme est englobé dans un jeu interactif.

Le jeu de rôle est de commettre le meurtre de personnes innocentes. Le jeune homme, interprété par Edward Furlong, est happé dans cet environnement dominant de ce jeu vidéo et ne sait plus faire la différence entre la réalité et la fantaisie. Tout se brouille dans sa tête. Il ne sait plus faire la part des choses, et se croit devenir fou. Le cinéma, à l’égard de la technologie de la réalité virtuelle, était critique, que ce soit ce film de Flynn, ou bien le film de Brett Leonard qui fait objet d’analyse, The Lawnmower Man. Ce cinéma se démarquait par la mise en garde des cinéastes, lorsqu’ils voulaient inculquer dans l’esprit d’un spectateur que la réalité virtuelle était démoniaque, ou une technologie incertaine.

Or, un autre cinéaste, tel que David Cronenberg, produisait dans son film eXistenZ, une critique et un commentaire social contre la culture des gamers et leur société de consommation électronique. Des gamers qui sont accros aux jeux vidéo, à un tel point qu’ils seraient assez volontaire pour se faire un port USB informatique dans leur bas du dos. D’un côté, on essaie de ridiculiser les gens qui n’auraient pas de vie, et qui voudraient trouver l’ultime façon d’échapper à leur réalité de tous les jours. De l’autre, on veut absolument montrer les dangers probables des nouvelles formes de technologie, desquelles on ne sait pas toujours quels sont les pleins potentiels. D’une façon, on affiche le scepticisme face à la science, car la science informatique ne travaille pas toujours pour le bienfait de l’humanité. On fournit un message dans ces films, où il faut traiter la technologie de la réalité virtuelle avec une certaine précaution. Elle peut faire tout autant de mal que de bien. En somme, les cinéastes font une critique de la réalité virtuelle, en dressant un commentaire sur la société des gamers. Quelque part, on veut tourner en ridicule, le fait d’être absorbé par les mondes virtuels. Et on se questionne si les gens qui pratiquent la simulation, ne savent plus la différence entre réel et virtuel.



La réalité virtuelle au cinéma, s’associe à un cinéma d’immersion. Ce cinéma a connu une existence assez courte. Cela vient du fait que l’on avait de grandes attentes envers le cinéma d’immersion, et les attentes n’ont jamais fructifiés et ne sont jamais actualisées. Mais déjà, c’était un vieux rêve, qui provenait en partie de l’histoire de l’art du XIXe siècle. Des tableaux picturaux devaient être en panoramique, disposés tout alentour d’une salle donnée. Des toiles, qui se devaient de représenter un paysage, étaient collées en rond, en une circonférence de 360°. Celui qui visitait le musée se trouvait plonger dans ces genres de panoramique, et se trouvait « immergé » de ce paysage environnant.

Il avait toute la ville qui planait autour de lui, à la manière de chaque tableau disposé autour de lui. En quelque sorte, le panoramique devint l’ancêtre du cinéma d’immersion. Un siècle plus tard, on essaiera de recréer cette immersion avec la technologie de la réalité virtuelle. En suivant cette évolution dans le cinéma des années 90, on va vouloir recréer la sensation de plonger, à pieds joints, au cœur de l’action d’un ordinateur. Dans le cas du film de Leonard, un simple d’esprit veut s’immerger au cœur de l’action du cyberespace, en devenant le « dieu » tout puissant de tout l’univers informatique. Un univers qui avait bien su l’apprivoiser, lorsqu’il s’éduquait à devenir intelligent, au moyen de la réalité virtuelle.

En ce qui attrait au cinéma, il existe bel et bien un mythe. Le mythe provient d’une série culte de science-fiction, jadis populaire durant la fin des années 80 et 90, Star Trek : The Next Generation. Dans la série télévisée, il existait un jeu d’immersion et d’interaction nommé le Holodeck. Dans le Holodeck, les passagers du vaisseau spatial Enterprise, rentrent dans un jeu qui est immensément réaliste, mais qui est un univers virtuel. Et de cet univers virtuel découle des mises en situations et des mises en intrigues. Ayant pour résultat que chaque passager de l’Entreprise, incarne un personnage propre dans un jeu de rôle. Dans l’univers du Holodeck, ils sont rapidement engloutis d’un univers, façonné par un ordinateur.

Les passagers contemplent et touchent au moindre détail, sans trouver un indice de supercheries. C’est la même situation que l’on retrouve avec le film de Leonard, The Lawnmower Man. Le personnage de Jobe Smith habite divers mondes virtuels, où il rentre en contact. Soit qu’il plane tout autour, qu’il touche des objets virtuels, ou il rentre en contact avec des créatures virtuels dans son cyberespace. Par la suite, dans tout ce cinéma d’immersion, il réside l’interactivité. En ce qui concerne l’interactivité, dès qu’un personnage se dit être dans un monde virtuel, il peut rentrer en contact et discuter avec eux. Les personnages sont confectionnés par l’ordinateur, avec leur propre intelligence artificiel.

Mais dans le cas du film de Leonard, il n’y a rien qui suggère des créatures ou des personnages virtuels. Les personnages réels et humains du film de Leonard, que ce soit Jobe ou le Dr. Angelo, sont amenés dans des univers virtuels destinés à augmenter l’intelligence de Jobe. Selon la question de l’interactivité, cela est extraordinaire. Virtuellement, on peut toucher les signaux cérébraux d’un être humain, sans aucun effort, afin de modifier l’intelligence de ce dernier. C’est là où on observe tout l’appareillage du danger que peut receler la simulation de la réalité virtuelle, dans l’interprétation de ce film. En résumé, la réalité virtuelle s’est réalisée à petit pas avec l’histoire de l’art. On voulait faire des panoramiques de tableaux, afin que le spectateur au centre, soit complètement immergé de l’univers des toiles en 360 degrés. La réalité virtuelle, agit sur le cinéma comme un cinéma d’immersion et d’interactivité, où dans le mythe de l’Holodeck, une personne est entourée de tout un univers construit et façonné autour de lui. Ensuite, il découvre une interactivité avec son environnement, ainsi que ses personnages virtuels.



Passons maintenant à la présentation de l’œuvre en question, The Lawmower Man, réalisé et co-scénarisé par Brett Leonard, puisque c’est une œuvre qui a incarné par excellence, tout l’univers de la réalité virtuelle. L’histoire du film The Lawnmower Man, se dit être inspiré d’une courte nouvelle de Stephen King, même que l’on disait dans le marketing publicitaire du film et dans ses affiches : Stephen King’s The Lawnmower Man. Or le film de Leonard dans son récit, ne ressemble en rien à la nouvelle du célèbre romancier. La seule ressemblance dans l’idée principale pour les deux œuvres, est que ce soit un homme tondeur de gazon. Dans la nouvelle de King, le tondeur de gazon est un satyre, une divinité parente à celui du dieu Pan. Il se fait passer dans la nouvelle pour un employé de jardinage et d’entretien paysagiste.

Autrement, dans le film de Leonard, c’est un simple d’esprit du nom de Jobe, qui travaille comme jardinier et tondeur de pelouse pour gagner sa vie, sous la tutelle d’un prêtre catholique stricte et véhément. Son état de simple d’esprit attire la compassion du Dr. Lawrence Angelo, un scientifique qui travaille dans les technologies de la réalité virtuelle. Le Dr. Angelo, en regardant Jobe tondre les pelouses, veut lui rendre un immense service. Ce serait d’améliorer chez lui ses facultés intellectuelles, grâce à la réalité virtuelle et les drogues. Au fil du temps, les expériences se couronnent de succès, et Jobe parvient à devenir brillant, même qu’il devient trop brillant. La réalité virtuelle et les drogues l’ont fait devenir un génie. Après être un génie, Jobe sombre dans la déchéance et la psychose, et développe par la suite, un complexe de messie. D’autre part, il devient sans le vouloir télépathique et psychokinétique : il lit aisément les pensées des autres, et bougent les objets avec son esprit. Il devient plus intelligent que le Dr. Angelo, celui qui l’a instruit et sauvé de son état de simplet. Au zénith de sa mégalomanie, il décide de faire corps avec la réalité du cyberespace, puisqu’il prétend que c’est son seul unique « chez soi », autrement que la réalité sur terre. Il réussit et abandonne son corps terrestre, qui se dissout en cendres, dans l’appareillage d’un cybersuit. Il rentre dans la réalité virtuelle de l’ordinateur central de l’institut de recherche du Dr. Angelo. Il réussit en s’échappant de l’ordinateur central et devient dieu du cyberespace.

Dans le film de Leonard, une symbiose se produit entre les images de synthèse, qui font l’issue de dépeindre avec une netteté suggérée la réalité virtuelle, ainsi que la prise de vue réelle et cinématographique. Étant donné que ce fut un film réalisé durant le début des années 90, il n’existait pas encore de cinéma digital ou numérique, comme nous le connaissons aujourd’hui. Par contre, en utilisant les images de synthèse, on redonne l’aspect de la réalité virtuelle du film, d’un autre monde, qui n’est pas la réalité vraie pour vraie.

C’est cela un peu, qui fait la différence entre l’illustration d’un monde virtuel dans le film de Leonard, et l’illustration d’un monde virtuel dans le film de Cronenberg, eXistenZ. Dans le film de David Cronenberg, la réalité virtuelle ressemble à la réalité véritable, d’une profonde exactitude que cela en est un parfait simulacre de la réalité vraie. Autrement, dans ce film de Cronenberg, les seules différences qui démarquent la réalité virtuelle de la réalité vraie, sont les créatures et les objets imaginaires de Cronenberg. Un objet dans la réalité virtuelle de Cronenberg, est un revolver construit à partir des ossements de crapaud et de grenouille, qui se permet de tirer des dents humaines. Cependant, dans le film de Leonard, c’est une toute autre approche. Au lieu de faire une copie de la réalité véritable et sensible pour en confectionner une réalité virtuelle comme chez Cronenberg, Leonard produit une réalité virtuelle informatisée et cartoonesque : une réalité virtuelle, qui est construite à l’aide de l’animation numérique. Cela dit, lorsque l’on mentionne l’animation numérique, nous sous-entendons également l’hyperréalisme. Le film de Leonard ne se bâtit pas sur le réalisme spectaculaire, puisque la technologie informatique, reliée au cinéma, n’était pas assez performante. Lorsque l’on compare ce film, avec un film plus récent tel que Speed Racer, on essaie par tous les moyens de truquer la réalité vraie, afin d’en construire un réalisme spectaculaire. Les effets spéciaux, les effets visuels numériques et les images de synthèse dans la réalité véritable suggérée par le film Speed Racer, ont pour but de convaincre le spectateur de toutes les nobles prouesses de la voiture Mach 3. Dans sa grande course vertigineuse et incroyable, la voiture défie toutes les lois de la physique et de l’inertie.

Le film The Lawnmower Man, n’est pas comme cela, dans le sens qu’il ne fait pas du réalisme spectaculaire avec les images de synthèse, et les effets visuels, ce qui détermine sa réalité véritable et non virtuelle. Concernant la réalité véritable du film, il existe fort bien des effets spéciaux ou des effets visuels. De plus, il y a un effort d’instaurer des effets spéciaux en images de synthèse, dans la réalité véritable du film, et ce n’est rien qu’une instance. C’est lorsque Jobe, étant doté maintenant de pouvoirs extraordinaires et surhumains, est capable de dématérialiser ses attaquants par son esprit. Il les dilue physiquement en petites boules de la taille d’une balle de ping-pong, et le boules minuscules se dissipent comme une nuée dans le néant. En conclusion, l’animation numérique définit le cyberespace et la réalité virtuelle du film de Leonard, avec la stricte utilisation des images de synthèse. Il n’y a pas de réalisme spectaculaire dans le film, avec les images de synthèse, considérant que c’était l’époque de 1992, et les technologies numériques n’étaient pas évoluées comme maintenant.



L’analyse du film The Lawnmower Man, peut se faire de diverses manières, même s’il serait intéressant de contempler et d’analyser ce film, seulement qu’au point de vue de son esthétique, en remarquant le côté esthétisant de ses segments en images de synthèse. Les segments qui caractérisent le monde virtuel du film, dans son côté du cyberespace. Or, si on parlerait de la forme, tout autant que de son esthétique de façon exclusive, on se bornerait à des choses essentielles qui constituent le contenu du film. Malgré que certains critiques puissent concevoir le film de Leonard, comme un banal film commercial de divertissement, le film discute en soi des nouvelles formes de technologie de son époque, qui paraissaient pourtant révolutionnaire. Cependant, ce ne sont pas toutes les attentes qu’on lui allouait, qui se sont concrétisées.

La réalité virtuelle s’est rapidement passée de mode. Mais le film de par son contenu, nous ouvre sur plusieurs avenues, en élucidant ses notions internes, qui se rapportent exclusivement à des thèses philosophiques. On applique la Philosophie au film de Leonard, en y discernant deux thèses philosophiques, qui se relient également au domaine de la technologie de la réalité virtuelle. Or, il faut faire la différence entre les deux thèses, car même au point de vue de la Philosophie, ils ne se ressemblent en rien. La première thèse s’associe d’une certaine manière à la littérature gothique en Grande-Bretagne, surtout lorsque l’on traite d’un roman de science-fiction qui est à la fois macabre et gothique : Frankenstein, ou le Prométhée moderne de Mary Shelley. Le film de Leonard, suit en quelque sorte la trame et la structure narrative du roman de Shelley, de même que l’on y fait certaines correspondances. L’histoire du livre de Mary Shelley va comme suit.

Un universitaire en médecine du nom de Victor Frankenstein, est un jeune homme dans la vingtaine qui démontre des habiletés inouïes et précoces pour le génie mécanique et le génie électrique. Victor ne se préoccupe plus de ses ambitions en médecine, et se consacre exclusivement à réanimer les membres détachés des corps d’animaux avec des courants électriques. Ce sont des premières expériences qui se soldent en succès : les bras et les jambes d’animaux divers, reprennent leurs forces et leurs motricités, lorsqu’un courant électrique traverse les nerfs. Les ambitions de Victor vont s’accroître, à un point tel, qu’il va décider dans une ambition farouche de vouloir être reconnu dans le monde pour son génie scientifique. Il tente le tout pour le tout, et décidera de réanimer un immense et statuesque corps humain, raccommodé et cousu ensemble par les membres de divers cadavres, déterrés dans un quelconque cimetière. Il réanime et couds le corps chez lui, dans un grand atelier de son appartement. Il se sert d’un paratonnerre lors d’une nuit orageuse, et la foudre frappe de plein fouet le paratonnerre et parvient à donner vie à l’immense créature. Victor, lui-même horrifié de ce qu’il a fait et de la créature, rejette la créature, et veut s’enfuir de ce dernier, en prenant le large. La créature court à ses trousses, jusqu’à l’extérieur de l’appartement, qui finit dans une rue londonienne. Victor s’enfuit et ne revoit plus jamais la créature, tandis que celui-ci s’est éloigné de la ville de Londres. La créature s’aventure dans la campagne, et habite clandestinement l’étable d’une famille de fermiers, sans qu’eux le sachent. Il apprend progressivement comment parler et communiquer, et développe son vocabulaire. Au départ, il essaie de les rencontrer en sortant de l’étable, pendant un jour d’été, mais la famille est verte de peur devant son apparence et chasse le monstre, comme un voleur. Il quitte la ferme, et erre ailleurs, et se décide finalement de retrouver son créateur, Victor Frankenstein, afin de proclamer sa vengeance sur lui. Le monstre maudit son créateur de l’avoir conçu dans une propre laideur hirsute, car il effraie les gens, frayant son passage. Le monstre parvient à retrouver Victor, et le supplie de donner naissance à une compagne comme lui, construite à sa ressemblance, et qu’il doit s’obliger de le faire parce que c’est son devoir de créateur. Mais Victor ne l’écoute pas et chasse le monstre. Le monstre, en colère de se faire ainsi bafoué, tue la fiancée de Victor, Elizabeth, à leur nuit de noces, ainsi que son meilleur ami, Henry Clerval. Victor et le monstre se rencontrent une dernière fois, et forment le pacte de se poursuivre mutuellement jusqu’aux fins de la terre, qui est l’Arctique polaire. Dans ce pacte, c’est qui parviendra à se tuer le premier, la créature ou son créateur, comme un duel. Vers la fin du livre, Victor se retrouve au Pole Nord, et se fait héberger par une expédition maritime voyageant dans une large caravelle, l’ayant trouvé gisant inconscient dans la neige de l’arctique, à côté de son traîneau à chiens. Il se retrouve dans une cabine du navire de l’expédition maritime, mort par le froid sur une couchette. Le monstre parvient à la cabine de Victor, constatant que celui-ci est décédé. Le monstre sort de la cabine la mort dans l’âme. Il se laisse voguer sur un glacier flottant, se dirigeant vers le Pole Nord. Sur le glacier, il se décide de se détruire lui-même, en incendiant le radeau de glace, ne laissant aucun indice de son existence, rejoignant l’abîme des fonds de l’océan Arctique.

C’est une magnifique histoire, n’est-ce pas ? Même si on le compare avec le scénario écrit par Brett Leonard et Gimmel Everett, d’un point de vue littéraire, le roman de Mary Shelley est encore supérieur au film de Leonard. Certes, le roman de Shelley est un grand classique de la littérature britannique, tandis que le film de Leonard, est un film plutôt intéressant et anodin en même temps, selon son impact. Certains vont même considérer que le film de Leonard agit comme une autre adaptation du livre de Shelley, en employant ses formules narratives. Dans le film de Leonard, Jobe est au départ dans le récit, un simple d’esprit. Pour plusieurs personnes, qui seraient des universitaires parmi les spectateurs visionnant le film, on attribue souvent l’idiotie, à une mort symbolique de l’esprit. En d’autres termes, le fait d’être attardé mental, est en soi une mort, car tout ce que l’on devient, est une bête de somme, sans développer son propre sens de soi et d’identité. Dans le livre de Shelley, la créature est déjà morte, physiquement et mentalement, et n’est qu’un assemblage cousu de membres de plusieurs cadavres, avant d’être réanimé pour la première fois. Le Dr. Angelo et Victor Frankenstein, ont des objectifs semblables, ceux de se faire reconnaître au monde entier, afin de démontrer leurs prouesses à l’humanité. Par souci de compassion, le Dr. Angelo veut améliorer la condition de Jobe. Il se dit intérieurement : « On ne peut le laisser comme cela, il est trop vulnérable. » Victor parvient à réanimer la créature. Le Dr. Angelo est habile pour rendre Jobe génial, à l’aide de drogues pour le cerveau, ainsi que la réalité virtuelle. La créature veut réagir contre Victor pour l’avoir créé, tout comme Jobe développe des pulsions mégalomaniaques, et surpasse son maître, le Dr. Angelo. La créature n’est plus en mesure de vivre seule, sans la compagnie d’une femme construite à sa ressemblance. Jobe n’est plus en mesure de vivre dans sa réalité environnante, et doit fuir à travers le cyberespace, parce que pour lui, le cyberespace est son élément. Ainsi, on trouve beaucoup de comparaisons entre l’histoire de Mary Shelley et l’histoire de Brett Leonard.

Passons à la deuxième thèse, qui est en soi celui de la Caverne de Platon. La réalité virtuelle remplit la métaphore de la Caverne de Platon. La réalité véritable et concrète agit comme le monde des idées, de la vérité idéaliste, bref le véritable monde extérieur. Dans le film, c’est cette opposition qui se joue entre les deux mondes, la réalité virtuelle et la réalité vraie. S’il faut expliquer la Caverne de Platon, en débutant par son mythe, il se déroule comme suit : des condamnés se retrouvent enchaînés dans une grotte, depuis leur tendre enfance. Dans la caverne, ils sont adossés à un mur, et au haut de celui, se retrouve un feu. Il y a une ouverture derrière ce feu, menant à l’extérieur, où de nombreux passants circulent. Devant l’ouverture de la grotte, les ombres des badauds se répercutent sur le grand mur où se trouvent également les prisonniers. Tout ce que les prisonniers voient sont les ombres des personnes à l’extérieur, les ombres de la réalité.

Au fait de la réalité virtuelle, ce sont les ombres que l’on s’impose à nous-mêmes. Ce sont les ombres de la réalité que l’on s’invente pour notre divertissement. Lorsque l’on parle de réalité virtuelle, avec ses appareils, comme le viseur et ses manettes, et que l’on veut s’immerger dans une réalité, on impose les ombres et l’illusion de la réalité sur nous-mêmes. Ce qu’il y a de plus étonnant, et très singulier, est que Jobe dans le film veut rejoindre le « monde des illusions », en voulant faire corps avec le cyberespace. Si on utilise la pure logique pour ce genre d’événements, nous savons que cela ne peut se faire, et que c’est complètement absurde de le faire. Or, il faut souligner que Jobe est devenu fou, à force de devenir « trop brillant », ne sait plus faire la différence entre la réalité et la fantaisie. Il veut rejoindre à tout prix, le monde de la fantaisie, qui se trouve à travers la réalité, et finit par quitter son corps terrestre. D’un côté absurde et fascinant, c’est que si Jobe était dans la métaphorique Caverne de Platon, à force de désespoir et de folie, Jobe s’aurait précipité de plein fouet au mur, projetant les ombres. Il aurait voulu tout de suite rejoindre les ombres, car il croit que la liberté réside par là. Mais dans le film, c’est une réussite et il parvient à devenir CyberJobe, en délaissant son corps naturel, pour qu’il ne devienne qu’un amas de cendres. Auparavant, la métaphore de la caverne était attribuée au cinéma, mais maintenant elle s’instaure dans la réalité virtuelle. Mais de toute façon, tout ce qui va servir d’ombres et d’illusion dans les arts, va quelque part rejoindre ce mythe de Platon. En somme, l’histoire du film rejoint l’histoire classique de science-fiction, Frankenstein de Mary Shelley, ainsi que l’allégorie de la caverne de Platon, qui rejoint la réalité virtuelle.



A première vue, le film The Lawnmower Man aurait pu être jugé comme une œuvre banale, et tout simplement commerciale. Mais au contraire, nous sommes loin de là, et le film recèle en lui de splendides découvertes. Le film est un témoignage de son temps, dévoilant la technologie de la réalité virtuelle. Nous avons découvert ensemble que la réalité virtuelle développait ses propres théories, au sujet du cinéma d’immersion et le cinéma d’interactivité. Nous avons également vu que la réalité virtuelle proposait en elle-même des thèses philosophiques, en poursuivant les mêmes thèmes et formules narratives dans le classique roman de Mary Shelley, et ainsi faire la démonstration de l’allégorie de la Caverne, inventée par Platon. On a examiné tout le questionnement philosophique relié au film, ainsi que le côté de l’immersion et de l’interaction se rattachant à la réalité virtuelle. Maintenant, nous devons mettre de côté le film de Brett Leonard, afin de s’interroger à propos de la nature de la réalité virtuelle, dans le film-culte de David Cronenberg, eXistenZ. Il serait fascinant de se questionner au sujet de la nature de la réalité virtuelle, qui illustre et représente le film de Cronenberg. On peut se questionner dans l’ensemble, des raisons pourquoi la réalité virtuelle du film ressemble à la réalité réelle, mais qui prend prétexte de fausseté. Est-ce que c’est une tentative de créer l’illusion qui est plus que parfaite ? Il devient davantage fascinant d’analyser ce film de Cronenberg.

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